PHOTOGRAPHIES
Lac Léman, 2014 - Ondu - image argentique- Daan Larjew - collection privée
Portrait Polaroid SX70 Manuela & Karoline 2018 - Daan Larjew -collection privée
Le Havre - Polaroid SX70 - 2018 - Daan Larjew -collection privée
Les images de Daniel Larrieu, alias Daan Lerjew, sont vides, presque, elles témoignent d'un instantané de lumière, d'un cadre libre, d'un patient regard sur des paysages traversés sans sujet apparent. Ce travail de création constitue un regard singulier sur le monde qui s'expose en silence. Absence de personnages, limites de la narration.
Rêverie de la limite
Façades juxtaposées ou blocs d’immeubles dressés comme de véritables mausolées anonymes. Plages désertées de leurs promeneurs, baignées d’une lumière silencieuse. Le littoral dont la fine ligne trouble se réduit en sa plus infime vibration bleutée et s’étend inexorable, au loin, illimité. Vestiges contemporains venus d’un décor expressionniste, la succession de chaque des tableaux glacés sur la fine surface de papier laisse libre court à la contemplation. De leur fragilité s’annonce leur disparition, similaire à celle du château de sable de notre enfance, dont la lente dispersion éparpille chacun de ses grains sur la grève au gré du vent inlassablement.
L’œil attentif se laisse surprendre, soudain envahi par l’impression d’un déjà vécu étrangement familier. Cette impression est elle-même emphatisée par la facture étrangement anachronique de chaque épreuve qui se succède et nous nimbe, à rebours, de cette douce atmosphère mélancolique des autochromes d’antan, frétillant dans notre mémoire, comme les mouvements d’une carpe japonaise ondulant entre les pousses de nénuphar en dormance.
Photographiques, ces différents espaces rendent compte d’une interprétation singulière du paysage, réinventé comme le simulacre parfait d’une matrice dont la facture obtenue et l’apparence, donnée pour vraie, transcendent le réel originaire ainsi mis en abîme, indissociable. Un paysage avec figures où l’objet tout comme la trace, se substituent dans l’espace photographique aux corps qui en ont fait l’usage, n’est-ce pas d’autant plus insister sur le subterfuge faisant d’elle le reflet immuable du monde et du temps, scintillant sur la vitre d’une fenêtre ouverte sur le paysage, telle une storia de la Renaissance?
Goutte d’eau d’une netteté parfaite, déposée sur le verre de l’objectif ou simple horloge, allégorie revisitée d’un memento mori, dressée du haut de son mat pour mieux se jouer de la fuite du temps, nous songeons dès lors à ce désir de maintenir présent ce qui est absent, puisant du fond de l’image toute sa force imagétique, au coeur de ces lieux balisés de tous ces petits riens qui apparaissent, se figent, puis disparaissent aussitôt. Espaces d’un temps suspendu, hors temps, dont l’effet de réel achève par nous conduire hors de nous-mêmes. Tel est l’étrange voyage auquel nous convie Daan Larjew. Bien plus qu’un simple acte photographique, les œuvres présentées esquissent un parcours évoquant, en ce sens, ce que les peintres antiques nommèrent en leur temps une rêverie de la limite.
Samuel de Jésus, Mars 2011
Rêverie de la limite
Façades juxtaposées ou blocs d’immeubles dressés comme de véritables mausolées anonymes. Plages désertées de leurs promeneurs, baignées d’une lumière silencieuse. Le littoral dont la fine ligne trouble se réduit en sa plus infime vibration bleutée et s’étend inexorable, au loin, illimité. Vestiges contemporains venus d’un décor expressionniste, la succession de chaque des tableaux glacés sur la fine surface de papier laisse libre court à la contemplation. De leur fragilité s’annonce leur disparition, similaire à celle du château de sable de notre enfance, dont la lente dispersion éparpille chacun de ses grains sur la grève au gré du vent inlassablement.
L’œil attentif se laisse surprendre, soudain envahi par l’impression d’un déjà vécu étrangement familier. Cette impression est elle-même emphatisée par la facture étrangement anachronique de chaque épreuve qui se succède et nous nimbe, à rebours, de cette douce atmosphère mélancolique des autochromes d’antan, frétillant dans notre mémoire, comme les mouvements d’une carpe japonaise ondulant entre les pousses de nénuphar en dormance.
Photographiques, ces différents espaces rendent compte d’une interprétation singulière du paysage, réinventé comme le simulacre parfait d’une matrice dont la facture obtenue et l’apparence, donnée pour vraie, transcendent le réel originaire ainsi mis en abîme, indissociable. Un paysage avec figures où l’objet tout comme la trace, se substituent dans l’espace photographique aux corps qui en ont fait l’usage, n’est-ce pas d’autant plus insister sur le subterfuge faisant d’elle le reflet immuable du monde et du temps, scintillant sur la vitre d’une fenêtre ouverte sur le paysage, telle une storia de la Renaissance?
Goutte d’eau d’une netteté parfaite, déposée sur le verre de l’objectif ou simple horloge, allégorie revisitée d’un memento mori, dressée du haut de son mat pour mieux se jouer de la fuite du temps, nous songeons dès lors à ce désir de maintenir présent ce qui est absent, puisant du fond de l’image toute sa force imagétique, au coeur de ces lieux balisés de tous ces petits riens qui apparaissent, se figent, puis disparaissent aussitôt. Espaces d’un temps suspendu, hors temps, dont l’effet de réel achève par nous conduire hors de nous-mêmes. Tel est l’étrange voyage auquel nous convie Daan Larjew. Bien plus qu’un simple acte photographique, les œuvres présentées esquissent un parcours évoquant, en ce sens, ce que les peintres antiques nommèrent en leur temps une rêverie de la limite.
Samuel de Jésus, Mars 2011
Cares 2010 numérique - Daan Larjew - Le Caire
αυτοκίνητο 2018 numérique - Daan ποταμός - Athènes